L’arrêté du 1er octobre 2019 relatif aux modalités de réalisation des analyses de matériaux et produits susceptibles de contenir de l’amiante ainsi qu’aux conditions de compétences du personnel et d’accréditation des organismes procédant à ces analyses[1] a abrogé l’arrêté du 6 mars 2003 relatif aux compétences des organismes procédant à l’identification d’amiante dans les matériaux et produits. Les laboratoires anciennement accrédités ont disposé d’une période de 18 mois pour les mettre en conformité avec les exigences du nouvel arrêté, ce qui a repoussé sa mise en œuvre effective au 21 avril 2021.


I. L’arrêté distingue trois types de matériaux et produits susceptibles de contenir de l’amiante :

– les matériaux et produits manufacturés, dans lesquels de l’amiante a été délibérément ajouté lors de la fabrication ou de la mise en œuvre ;
– les matériaux et produits bruts, dans lesquels de l’amiante est naturellement présent par nature pétrographique des roches etp produits minéraux ;
– les matériaux et produits manufacturés, dans lesquels de l’amiante est naturellement présent dans un ou plusieurs de ses composants en raison de la nature pétrographique des roches et produits minéraux.

En conséquence, il crée trois portées d’accréditation :

– la première relative à la recherche d’amiante délibérément ajouté dans les matériaux manufacturés (unique portée prévue par l’arrêté du 6 mars 2003) ;
– la deuxième relative à la recherche d’amiante naturel (ou environnemental) dans les roches et sols en place ;
– la troisième, relative à la recherche d’amiante naturel dans les matériaux manufacturés.

Pour rappel, le choix du laboratoire en charge d’analyser les échantillons prélevés dans le cadre de sa mission revient à l’opérateur de repérage [2]. Dans le domaine des immeubles bâtis, l’amiante susceptible d’être présent a généralement été délibérément ajouté lors de la fabrication ou au moment de la mise en œuvre du matériau de construction, ce qui implique d’avoir recours à un laboratoire titulaire de la portée d’accréditation n°1. La présence possible dans certains matériaux manufacturés (par exemple enrobé des voieries privées) de granulats pouvant contenir de l’amiante naturel peut nécessiter d’avoir recours à un laboratoire également titulaire de la portée d’accréditation n°3.

II. Chaque couche dissociable d’un échantillon doit faire l’objet d’une analyse propre.

Selon l’article 4 de l’arrêté, un matériau ou produit peut être constitué d’une ou plusieurs couches. Une couche est un élément pouvant être distingué des autres éléments par superposition ou stratification. Elle peut être homogène ou hétérogène à l’œil nu. Une couche hétérogène contient plusieurs composants dont les natures et caractéristiques physico-chimiques sont différentes.

• À réception des échantillons (quel qu’en soit le type), le laboratoire est tenu de vérifier les points suivants, qui relèvent de la responsabilité de l’opérateur de repérage ayant effectué les prélèvements :
– chaque échantillon est conditionné individuellement sous double emballage étanche à l’air ;
– il est identifié par une référence unique inscrite de manière indélébile sur son conditionnement. Cette identification assure sa traçabilité et est reprise sur la fiche d’accompagnement ;
– la demande précise la ou les composants ou couches que l’opérateur de repérage a distingués lorsqu’un matériau est hétérogène ou multicouche ;
– la quantité d’échantillon fournie correspond à la quantité minimale nécessaire pour permettre la réalisation de l’essai adapté, ainsi qu’un archivage en vue d’une contre-analyse éventuelle.

Le non-respect d’un ou plusieurs des points listés ci-dessus conduit à une réserve mentionnée dans le rapport ou à un rejet de l’échantillon.

La fiche d’accompagnement doit contenir au minimum le numéro de dossier ou numéro de commande, les nom et adresse de l’opérateur de repérage, la liste des échantillons identifiés par une référence individuelle unique, le type de matériau ou produit prélevé, l’aspect du matériau ou produit prélevé, le nombre et la nature des couches à analyser, la date de l’envoi, le cas échéant, la nature du produit utilisé pour limiter l’émission éventuelle de fibres et l’information au laboratoire en cas de pollution surfacique suspectée sur l’échantillon.

• Avant de mettre en œuvre les essais, le laboratoire doit procéder à :
– un examen visuel à l’œil nu de l’ensemble de l’échantillon, qui conduit à une description détaillée de sa nature et au constat de la présence ou de l’absence de fibres visibles ;
– un examen à la loupe binoculaire, à des grossissements continus (x 10 à x 40), afin de repérer les différentes couches susceptibles de contenir de l’amiante composant l’échantillon, de constater la présence ou non de fibres visibles et de constituer des prises d’essai en vue de leur analyse.

Si au cours des opérations le laboratoire identifie un composant de l’échantillon susceptible de contenir de l’amiante qui n’a pas été distingué à l’œil nu par l’opérateur de repérage, il effectue un essai et en rend compte dans son rapport.
Dans le cas d’un matériau multicouche ou hétérogène dont plusieurs couches ou parties sont à analyser, chaque couche ou partie dissociable est analysée séparément, sauf si la prise d’essai ne permet pas de les dissocier. Dans ce cas, les raisons qui conduisent à analyser les couches sans les dissocier sont clairement précisées dans le rapport d’essai.

Pour rappel, la nécessité d’analyser séparément chaque couche d’un matériau multicouche figurait déjà dans la dernière version (2017) de la norme NF X46-020 (Repérage amiante – Repérage des matériaux et produits contenant de l’amiante dans les immeubles bâtis – Mission et méthodologie [3]).

Ce document stipule notamment que l’opérateur de repérage doit :
– dans le cas d’une mission « Démolition », effectuer les prélèvements sur toute l’épaisseur du matériau ou produit, de façon à ce que le laboratoire puisse réaliser une analyse couche par couche ;
– dans le cas d’une mission «Travaux», effectuer les prélèvements de façon à ce que le laboratoire puisse réaliser une analyse couche par couche, sur toute ou partie de l’épaisseur du matériau ou produit en fonction du programme de travaux à effectuer ;
– dans le cadre d’une mission Vente, DTA, DA‐PP, effectuer des prélèvements des matériaux et produits concernés, sur toute l’épaisseur pour les flocages, calorifugeages et faux‐plafonds.
– dans tous les cas, indiquer la (ou les) couche(s) à analyser au laboratoire.

Pour chaque couche de l’échantillon, la quantité prélevée doit être suffisante pour permettre une description macroscopique, une analyse et une contre‐analyse.

Dans le cas de matériaux associés ou adjacents (exemple : dalle + colle + ragréage), chaque matériau ou produit est, dans la mesure du possible, conditionné séparément lors de ‘échantillonnage sur site pour éviter les risques de contamination et prélevé en quantité suffisante pour chacun des constituants.
Lorsque l’échantillon contient un matériau multicouche, la fiche d’accompagnement transmise au laboratoire doit comporter le type et l’aspect du matériau ou produit prélevé, la définition du matériau (texture, couleur) ainsi que sa description par couche et le nombre de couches du matériau ou produit à analyser.

III. Le laboratoire met en œuvre des méthodes de détection et d’identification différentes selon qu’il s’agit d’amiante délibérément ajouté ou naturellement présent dans les matériaux
ou produits manufacturés.

Les essais au microscope doivent permettre de détecter et d’identifier les fibres d’amiante (chrysotile et cinq variétés d’amphiboles) dont le rapport longueur sur largeur est supérieur à 3 et la longueur est supérieure à 0,5 micromètre (µm).
La microscopie optique à lumière polarisée (MOLP) permet de détecter des fibres d’amiante de largeur supérieure à 200 nanomètres (nm), soit 0,2 µm, et de les identifier selon leur morphologie et leurs propriétés optiques.
La microscopie électronique à transmission analytique (META) permet de détecter des fibres de largeur supérieure à 20 nm (0,02 µm) et de les identifier selon leur morphologie, leur structure cristalline et leurs compositions chimiques et structurales.

Quelle que soit la méthode, chaque couche à analyser fait l’objet d’au minimum 2 prises d’essai conduisant chacune à au moins une préparation (MOLP) ou à l’obtention de deux grilles d’observation (META).

• Pour l’amiante délibérément ajouté dans les matériaux et produits manufacturés, la méthodologie est la suivante :

1/ Si des fibres libres sont observées dans une couche à l’examen préalable à la loupe binoculaire, la couche est analysée par MOLP :
– si l’analyse est positive sur au moins une des préparations, il est conclu à la détection de fibres d’amiante ;
– si l’analyse est négative sur toutes les préparations et qu’il s’agit de matériaux susceptibles de contenir majoritairement des fibres minérales artificielles ou organiques (laine de roche, laine de verre, etc.), il est conclu à la non-détection de fibre d’amiante ;
– s’il y a un doute sur le résultat (matériau non connu, identification équivoque, contamination ou autre raison), l’échantillon fait l’objet d’une analyse complémentaire par META ou par toute autre méthode validée pour la détection et l’identification de fibres d’amiante de largeur d’au moins 20 nm.

2/ Si aucune fibre libre n’est observée à l’issue de l’examen préalable à la loupe binoculaire, la couche est analysée en META (ou autre méthode validée). Si l’analyse est positive sur au moins l’une des deux grilles d’une préparation, il est conclu à la détection de fibres d’amiante.
• Pour la détection et l’identification d’amiante naturellement présent dans les matériaux et produits manufacturés, les prises d’essai et les méthodes de préparation (ex. : montage direct, broyage manuel dans un mortier en agate, traitement acide, calcination, sédimentation et flottation…) sont adaptées à la nature du matériau (enrobés, carottes d’enrobé, bétons, matériaux présents dans des sols pollués…) et aux méthodes d’analyse.

Les essais sont réalisés en fonction des résultats de l’examen préalable à l’œil nu et à la loupe binoculaire. Si l’échantillon présente un liant hydrocarboné (ex. : certains enrobés bitumineux…) une observation est effectuée sous loupe binoculaire après élimination du liant pour une meilleure visualisation de la phase minérale.

Les composants de l’échantillon susceptibles de contenir de l’amiante délibérément ajouté (particules ou liant résiduels…) sont analysés conformément à la procédure précédente.
La partie de l’échantillon susceptible de contenir de l’amiante naturellement présent (granulat…) est analysée par MOLP :

-si l’analyse est positive sur une préparation, il est conclu à la détection de fibres d’amiante ;
-si l’analyse est négative sur les lames de toutes les préparations et compte tenu notamment de la nature pétrographique du matériau dans le cas des roches susceptibles de ne pas contenir de l’amiante, il est conclu à la non-détection de fibre d’amiante ;
-si l’analyse est négative sur les lames de toutes les préparations mais qu’il s’agit d’une roche susceptible de contenir de l’amiante, l’échantillon fait l’objet d’une analyse complémentaire par META ou par toute autre méthode validée permettant la détection et l’identification de fibres d’amiante de largeur d’au moins 20 nm. Chaque préparation conduit à l’obtention de deux grilles de microscopie à observer. Si l’analyse est positive sur au moins l’une des deux grilles, il est conclu à la détection de fibres d’amiante.

[1] https://www.legifrance.gouv.fr/loda/id/JORFTEXT000039242655/

[2] https://travail-emploi.gouv.fr/IMG/pdf/exceptions_et_dispenses_pour_en_savoir_plus.pdf

[3] https://www.boutique.afnor.org/norme/nf-x46-020/reperage-amiante-reperage-des-materiaux-et-produits-contenant-de-l-amiante-dans-les-immeubles-batis-mission-et-methodologie/article/867769/fa186482